A la demande de l’Onusida et du Fonds Mondial contre le sida, le paludisme et la tuberculose, j’ai mené en 2018 en Côte d’Ivoire une mission pour proposer une stratégie de communication destinée à augmenter la demande de tests de dépistage pour le VIH. Suivant la démarche de culture en santé (health literacy) qui est la mienne, j’ai commencé par une enquête socio-anthropologique menée en collaboration avec l’université Houphouët-Boigny.
Notre enquête a montré que le principal obstacle au dépistage était l’image du VIH, toujours associé au sida et à la mort alors que dans le pays 84 % des personnes séropositives connaissant leur statut sont aujourd’hui sous traitement antirétroviral et vivent en bonne santé. Autre résultat, les idées fausses sur le VIH, notamment cette association à la mort, étaient particulièrement présentes chez les jeunes, jeunes qui disaient qu’une de leur principale source d’information était l’école.
J’ai donc analysé le contenu des livres scolaires des cinq classes dans lesquelles le VIH est abordé. Et là, surprise : dans leur quasi-totalité ces manuels affirment que le VIH conduit à la mort, au mieux sans mentionner l’existence de traitements, au pire en avançant qu’aucun traitement n’existe ! Ne pensez pas que ces livres soient anciens : ils ont tous été imprimés entre 2007 et 2017, longtemps donc après l’introduction des traitements antirétroviraux en Côte d’Ivoire. Les éditeurs sont ivoiriens et français (Hatier et Bordas).
En faisant apparaître l’annonce de la séropositivité comme une sentence de mort, les livres scolaires représentent un obstacle majeur au dépistage du VIH, le meilleur argument pour celui-ci étant qu’il permet de bénéficier d’un traitement si on est séropositif.
J’ai publié cette étude dans le Bulletin de la Société de Pathologie Exotique : « Côte d’Ivoire : la désinformation des manuels scolaires sur l’infection à VIH ».
blog bnscommunication (Bernard Seytre) 